> Françoise MONNIN
Entre - deux
Nadya Bertauxnt tourne la page, & Hye-Sook Yoo
Griser l’univers et, ce faisant, nous griser. Gris plus noir que blanc, chez Hye-Sook Yoo, plus blanc que noir, chez Nadya Bertaux : la première œuvre en deux dimensions, au crayon ou au pinceau. La seconde, en trois, à l’aide de fil d’aluminium. Toutes deux trament des espaces denses. Organiques pour Yoo. Cosmiques pour Bertaux.
Elles incarnent ainsi des nodules compacts. Saturés, ceux de Yoo évoquent des enveloppes puissantes, des protections extrêmes. Sa serviette ; sa veste ; sa chevelure : tout ce qui touche au plus près son corps - absent de la représentation mise en scène - est sublimé. Paraissant suspendue, chacune des dépouilles figurées transcrit simultanément une sensualité vive et une inertie absolue. Allégories du désir et de la patience.
Les formes imaginées par Bertaux échappent, en revanche, à l’intime. Évocations du temps universel et des métamorphoses qu’il engendre, chacune est ronde, souple, ajourée. Dansant avec le vide, le souffle, elle en célèbre la vitalité, en signifie l’aptitude à définir des présences. Inspirée par les emmêlements de brindilles roulées au fil du vent, chacune de ces sculptures en célèbre la créativité originelle.
Yoo évoque le désir, la mémoire, le rêve de là-bas. Bertaux, l’évidence, le commencement, la réalité d’être ici. La rencontre de ces deux artistes, voisines d’atelier à Issy-les-Moulineaux, est celle de deux modes d’être au monde.
Françoise Monnin,
Paris, juin 2009
Pour l'expostition "Trait d'union" Espace Icare, Issy-les-Moulieaux